Elle marche d'un pas rapide. Iris est en retard, très en retard. Elle avait fini les cours à 15 heures et elle devait rentrer tout de suite après, du moins c'est-ce qu'elle avait dit à Oz . C'est ce qui était prévu, mais à la sortie du lycée elle avait croisé Sam. Sam et son regard dangereux, il avait une idée derrière la tête, Iris pouvait le voir. Il avait fallu d'un simple regard pour qu'elle comprenne. Il s'était rejoint à leur endroit habituel, loin des regards des autres lycéens. Relation secrète, rien n'était simple entre eux. Mais aujourd'hui les choses se déroulaient plutôt bien, pas de dispute à l'horizon. Tellement bien qu'elle avait arrêté de vérifier l'heure, elle avait la tête ailleurs, dans les étoiles peut-être. Oz complètement sortie de sa tête, elle n'avait pas songée bon de le prévenir de son petit retard.

Ils s'étaient finalement quittés, laissant Iris marcher seule en direction de l'appartement. Elle n'avait aucune idée de l'heure qu'il était, la batterie de son téléphone était morte. En tout cas la nuit était tombée depuis un moment déjà. Et même si elle marchait d'un pas rapide, elle ne se mettait pas la pression le moins du monde, sans la moindre appréhension de la réaction d'Oz. C'était loin d'être la première fois qu'elle faisait un coup pareil.
Arrivée devant la porte elle fait tourner la clé en douceur, elle n'ouvre qu'un petit peu la porte, scrutant le moindre bruit. Rien. Du moins aucun gamin. Bon, il fait encore plus tard qu'elle ne se l'imaginait, mais la blonde est toujours très loin de la panique. Elle rentre entièrement et jette son sac en plein milieu du couloir, comme à son habitude. Elle entend un bruit venant de la cuisine, elle s'y rend. Oz s'y trouve. « Salut. » c'est le plus naturellement du monde que le mot sort de sa bouche. Rester polie en toutes circonstances c'est important non ? Elle cherche de quoi se servir un verre d'eau. Opération excuse bidon lancé. « désolé pour le retard, mais j'avais une tooonnes de devoir, su coup je suis resté avec .. Sarah, pour un réviser un peu. Et puis j'avais plus de batteries. Alors voilà. » Ça n'avait aucun sens. Elle n'arrivait même pas à se convaincre elle-même alors aucun doute qu'il n'allait pas la croire, elle s'en doutait et s'en foutait aussi. Tout ce qu'elle voulait c'est qu'il ne sache pas la vérité.

02h t'y crois toi? Dans les faits c'est pas l'heure qui l'dérange, il en a rien à battre qu'elle rentre à 18 heures ou 3 heures. Non, ce qui l'emmerde davantage ce sont les raisons qui font qu'elle est encore dehors à une heure aussi tardive. Avec c'te gamine t'as pas b'soin d'chercher des heures. Tu prends un S, t'y ajoute un A, puis tu finis avec un M, et la réponse coule de source. Trois lettres qui occupent une grande partie de la problématique d'Iris. Trois lettres qu'Oz maudit et aimerait éclater les unes après les autres. Alors si tu veux une p'tite explication sur l'cas Sam, la voilà en des termes clairs : p'tit merdeux profitant de la crédulité d'une gamine folle amoureuse. Voilà ce qu'il était, une p'tite merde, mais pas de celles dont on se débarrasse facilement, non de celles qui vous collent bien au cul.

L'attente est longue, surtout que le barman n'est pas franchement réputé pour sa patience. 2h20. Attendre le rend fou. Attendre, et ses vieux démons reviennent au galop. La soif et le manque. Les voilà ses amis de toujours. Son amante le hante. Elle n'est pas loin, à deux rues d'ici. Sa bouteille.
Une cigarette.
Puis deux.
Soigner une addiction par une autre, n'est-ce pas l'idée du siècle Oz ? Ça marche parfois, mais aujourd'hui la salope est tenace. Madame soif l'irrite. L'heure défile et la gamine n'est toujours pas rentrée.
Une troisième.
Ah. n'était-ce pas la serrure ? Des pas dans le couloir? Ou simplement le manque qui l'rend taré ? Non pas cette fois. La gosse est là, le baratinant, encore, toujours. Partagé entre soulagement et colère, le barman reste affalé sur le plan de travail de la cuisine. Allongé sous la hotte, il a passé les derrières heures à compter les trous de l'aspiration, tandis que la fumé s'y échappait. « Remballe » Tu te fatigues pour rien gamine, Oz il est p't'être con, mais quand il s'agît de cramer tes mensonges il a trois longueurs d'avance. « Tu l'as revu ? » Hein ? C'est ça Iris ? T'as revu cet abruti de Sam et tu veux la lui jouer bonne élève, il te pensait bien plus fine et imaginative, c'en est presque décevant venant d'une gosse aussi futée que toi. Il tente tant bien que mal de cacher son énervement. Clope au bec, son ton est calme, mais se perçoit une pointe d'agacement qui laisserait presque transparaître la tempête à venir.